Microbiote et inflammation : pourquoi sont-ils au cœur de la fibromyalgie?
Notre corps est un temple qui abrite un écosystème complexe: le microbiote intestinal. Bien plus qu’un simple assistant à la digestion, il joue un rôle majeur dans notre santé globale. Loin de n’être qu’une affaire d’intestins, son équilibre influence également des mécanismes tels que:
- l’immunité,
- l’inflammation,
- et même la perception de la douleur.
Pour les personnes souffrant de douleurs chroniques, comme la fibromyalgie, ce lien peut être déterminant. Mais comment un déséquilibre du microbiote, appelé dysbiose, peut-il amplifier ces douleurs ? Et surtout, que peut-on faire pour agir naturellement sur ce levier ? Dans cet article, j'étudie les relations entre microbiote et inflammation, et je vous propose des pistes naturopathiques pour mieux vivre avec les douleurs chroniques.
1- Le rôle du microbiote dans le corps
A) Qu’est-ce que le microbiote intestinal ?
Le microbiote est constitué de milliards de micro-organismes (bactéries, levures, virus) qui vivent principalement dans notre intestin. Ce "monde invisible" contribue à des fonctions vitales :
- Faciliter la digestion, et l’assimilation des nutriments ;
- Renforcer la barrière intestinale, notre première défense contre les toxines ;
- Participer à la synthèse de vitamines, et de neurotransmetteurs, comme la sérotonine (impliquée dans le lâcher prise, et l'humeur). Cette dernière est fabriquée à 90% dans l'intestin grêle, et est un précurseur de la mélatonine, qui nous permet de dormir.
B) Microbiote et inflammation : une relation complexe
Un microbiote en bonne santé maintient un équilibre entre molécules pro- et anti-inflammatoires. Cependant, lorsqu’il se déséquilibre (dysbiose), cela peut provoquer :
- Une augmentation de la perméabilité intestinale, souvent appelée "syndrome de l’intestin poreux". Ce phénomène laisse passer des toxines, et des particules alimentaires dans le sang, activant une réponse inflammatoire chronique.
- Une production accrue de médiateurs inflammatoires, comme les cytokines, qui peuvent amplifier les douleurs.
2- Le lien entre microbiote déséquilibré et douleurs chroniques
A- Microbiote et perception de la douleur
Le microbiote intestinal joue un rôle fondamental dans la modulation de la douleur via l’axe intestin-cerveau. Ce lien complexe repose sur des mécanismes biologiques précis :
L’axe intestin-cerveau et la communication bidirectionnelle
- L’intestin et le cerveau communiquent en permanence par le nerf vague, des molécules immunitaires, et des neurotransmetteurs produits par les bactéries intestinales.
- En cas de déséquilibre du microbiote (dysbiose), cette communication peut être altérée, amplifiant la perception de la douleur.
L’inflammation et la sensibilisation des récepteurs de la douleur
- La dysbiose peut entraîner une augmentation de la perméabilité intestinale, souvent appelée "syndrome de l’intestin poreux". Ce phénomène laisse passer dans le sang des toxines, et des bactéries qui activent le système immunitaire.
- Résultat : une inflammation chronique qui sensibilise les récepteurs nerveux de la douleur, notamment les nocicepteurs, amplifiant ainsi les sensations douloureuses.
Impact sur les neurotransmetteurs
- Les bactéries du microbiote produisent des neurotransmetteurs comme la sérotonine (impliquée dans l’humeur et la douleur) et le GABA (qui joue un rôle calmant).
- Une dysbiose peut réduire la production de ces molécules, contribuant à un état de tension nerveuse, et d’hypersensibilité à la douleur.
Les mécanismes d’hypersensibilisation centrale
- Dans la fibromyalgie, le système nerveux central devient hyper-réactif aux signaux douloureux.
- Des études récentes suggèrent que ce phénomène pourrait être augmenté par un microbiote déséquilibré, qui influence à la fois l’inflammation, et la régulation des voies nerveuses.
- Une étude de 2019 a analysé le microbiote de patients atteints de fibromyalgie. Les chercheurs ont observé une diversité bactérienne réduite, notamment un déficit de bactéries anti-inflammatoires comme Faecalibacterium. Ce déséquilibre semblait corrélé à une intensité plus élevée des douleurs perçues.
B) Les marqueurs d’un microbiote déséquilibré chez les personnes souffrant de fibromyalgie
Les troubles digestifs sont souvent les premiers signes : ballonnements, diarrhées, ou constipation. Mais un microbiote déséquilibré peut également se manifester par :
- Fatigue chronique, liée à une absorption réduite des nutriments et à l’inflammation , et une mauvaise récupération ;
- Des troubles du sommeil, liés à une sérotonine insuffisante ;
- Douleurs articulaires ou musculaires dues à l’amplification des cytokines pro-inflammatoires.
- Maux de tête fréquents, parfois en lien avec une intolérance à l’histamine.
- Une humeur fluctuante (irritabilité, anxiété), aggravant la perception de la douleur.
- Une altération de la production de métabolites bénéfiques comme le butyrate, nécessaire à la réparation intestinale et à la régulation de l’inflammation.
- Une accumulation de toxines ou de molécules mal métabolisées, entraînant des réactions comme des éruptions cutanées ou des sensibilités alimentaires accrues.
3- Prendre soin de son microbiote pour soulager les douleurs chroniques
Le lien étroit entre microbiote, inflammation et perception de la douleur souligne l’importance de maintenir un microbiote équilibré. Voici des pistes naturopathiques concrètes pour agir naturellement sur cet écosystème.
A- Alimentation : le 1er levier pour nourrir votre microbiote
Privilégiez les aliments prébiotiques :
Les prébiotiques nourrissent les bactéries bénéfiques. On les trouve dans des aliments comme :
- Les légumes riches en fibres : poireaux, artichauts, asperges ;
- Les fruits : pommes, bananes (non mûres) ;
- Les graines : lin, psyllium.
Intégrez des probiotiques naturels :
Ces micro-organismes vivants aident à renforcer la diversité bactérienne. Sources naturelles :
- Yaourts et kéfir de fruits ;
- Légumes fermentés (choucroute, kimchi).
Réduisez les irritants :
Une alimentation pro-inflammatoire perturbe le microbiote. Évitez :
- Les sucres raffinés et les aliments ultra-transformés ;
- Les céréales modifiées, et les laitages d'animaux ainsi que leurs dérivés
- Les excès d’alcool, ou de caféine.
B- Restaurer la barrière intestinale pour réduire l’inflammation
Une barrière intestinale endommagée peut être une source d’inflammation chronique. Quelques alliés naturels :
- Acides gras comme le butyrate : naturellement produit par des bactéries spécifiques, il peut être soutenu par la consommation de fibres fermentescibles (comme dans les aliements suivants: topinambour, artichauts, poireaux, oignons, ail, asperges, bananes (non mûres), chicorée, asperges, pommes, agrumes, carottes, prunes, raisins, baies, champignons (notamment shiitake, maitake), Légumineuses (lentilles, pois chiches, haricots), lait maternel, légumes à feuilles, graines, céréales complètes, carottes)..
- Plantes apaisantes : la réglisse (DGL), l’aloe vera, et la glutamine aident à réparer la muqueuse intestinale.
- Oméga-3 : présents dans les poissons gras (sardines, saumon) ou les graines de chia, ils réduisent l’inflammation systémique.
4- Adopter une hygiène de vie favorable à l’équilibre du microbiote
Le microbiote est sensible à bien plus que l’alimentation. D’autres habitudes jouent un rôle :
A-Réduire le stress
Le stress chronique a un impact direct sur l'axe intestin-cerveau, perturbant l'équilibre du microbiote et favorisant l'inflammation. Voici comment cela se manifeste :
Activation du système nerveux sympathique :
Diminution du flux sanguin vers l’intestin, perturbant la motilité et le microbiote.
Excès de cortisol :
L’hormone du stress augmente la perméabilité intestinale, permettant aux toxines et bactéries de passer dans la circulation sanguine, provoquant inflammation et douleur.
Déséquilibre des neurotransmetteurs :
Le stress réduit la production de neurotransmetteurs comme la sérotonine, affectant la gestion de la douleur, et l'humeur.
Altération du microbiote :
Le stress favorise les bactéries pathogènes, et réduit la diversité des bonnes bactéries, aggravant l'inflammation et la douleur.
Pour apaiser le stress et rééquilibrer le microbiote, adoptez ces pratiques :
Méditation de pleine conscience : Réduit les niveaux de cortisol et favorise la régénération du microbiote.
Cohérence cardiaque : Technique de respiration qui régule le système nerveux et apaise l’intestin.
Yoga : Stimule la circulation sanguine intestinale et réduit l’anxiété.
Promenades en nature : Réduit le stress et améliore la santé intestinale
Sommeil réparateur : Optimise la régénération du microbiote et réduit les effets du stress.
B- Lien entre le microbiote intestinal, et le sommeil
Un sommeil de qualité est essentiel pour l'équilibre du microbiote. Le manque de sommeil, ou un sommeil perturbé, peut avoir des effets délétères sur la diversité des bactéries intestinales, et aggraver les douleurs chroniques. Voici comment un mauvais sommeil impacte négativement le microbiote :
Perturbation des rythmes circadiens :
Un sommeil irrégulier perturbe les rythmes biologiques, influençant directement l’activité des bactéries intestinales, qui sont sensibles à ces cycles. Cette perturbation diminue la diversité bactérienne bénéfique.
Augmentation du cortisol :
Le manque de sommeil entraîne une surproduction de cortisol, l’hormone du stress, qui favorise l'inflammation intestinale, et réduit la diversité des bonnes bactéries, essentielles pour l’équilibre du microbiote.
Réduction de la production de butyrate :
Le sommeil perturbé affecte la production d’acides gras à chaîne courte, comme le butyrate, qui nourrit les cellules de la paroi intestinale, et maintient une barrière intestinale saine.
Déséquilibre dans la production de neurotransmetteurs :
Un sommeil insuffisant perturbe la production de neurotransmetteurs, tels que la sérotonine, qui sont fabriqués en grande partie dans l’intestin. Cette altération peut affecter la gestion de la douleur et l’équilibre émotionnel.
C- Réguler l’histamine en cas de troubles associés
L’histamine est une molécule clé impliquée dans de nombreux processus biologiques, y compris les réponses immunitaires, l’inflammation et la régulation digestive. Cependant, lorsqu’il y a excès d’histamine ou une déficience en DAO (Diamine Oxydase, l’enzyme qui dégrade l’histamine), cela peut perturber le microbiote intestinal et aggraver certains symptômes, y compris les douleurs chroniques. Voici comment cela se manifeste :
Excès d'histamine :
Un excès d’histamine peut dérégler l’équilibre du microbiote intestinal, en favorisant la croissance de certaines bactéries productrices d'histamine, perturbant ainsi la diversité bactérienne bénéfique.
Inflammation intestinale :
L’histamine joue un rôle dans la réponse inflammatoire. Lorsqu’elle est présente en trop grande quantité, elle peut provoquer une inflammation de la paroi intestinale, entraînant une perméabilité intestinale accrue ("leaky gut"). Cela permet à des substances étrangères, comme des toxines et des bactéries, de passer dans la circulation sanguine; et de provoquer des symptômes systémiques, y compris des douleurs.
Problèmes digestifs :
Un excès d’histamine peut aussi perturber la production d’acides gastriques, ce qui entraîne des troubles digestifs (reflux acide, ballonnements, digestion ralentie) et nuire à l’équilibre du microbiote.
Rôle de la DAO :
La DAO est l’enzyme qui aide à dégrader l’histamine dans l’organisme. Si cette enzyme est insuffisante ou non fonctionnelle, l’histamine s’accumule dans le corps, ce qui peut entraîner des symptômes d’intolérance à l’histamine, comme des douleurs, des migraines, des troubles digestifs, et de la fatigue.
Relation avec les douleurs chroniques :
Chez les personnes souffrant de douleurs chroniques, comme la fibromyalgie, un excès d’histamine peut augmenter l’inflammation et la douleur, créant ainsi un cercle vicieux difficile à briser. Il est donc essentiel d’être vigilant à l’impact de l’histamine dans le régime alimentaire, et le mode de vie.
5- Et pour conclure
En résumé, le microbiote intestinal joue un rôle central dans la gestion de la douleur chronique, notamment dans la fibromyalgie. Un microbiote équilibré permet de moduler l’inflammation, de renforcer l’axe intestin-cerveau, et de soutenir l’équilibre émotionnel, contribuant ainsi à une meilleure gestion de la douleur.
Cependant, l’alimentation, le stress, le sommeil, et même des facteurs comme l’intolérance à l’histamine, peuvent perturber cet équilibre. Dans tous les cas, il est essentiel de ne jamais interrompre ou modifier un traitement médicamenteux sans l’avis de votre médecin. Si vous avez des questions concernant l'impact des médicaments sur votre microbiote, n'hésitez pas à lui en parler. Une approche intégrée et personnalisée, qui combine les traitements médicaux, et les solutions naturelles, est la clé pour prendre soin de votre bien-être sur du long terme.
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